Le livre d'Emmanuel Delhomme a eu droit à plusieurs papiers dans la presse, suffisamment pour aiguiser la curiosité. Peut-être que nous allions apprendre des choses, avoir une autre vision du métier et de ses problématiques... tel n'est pas le cas. Les points essentiels sont là, couchés dans les articles sélectionnés par l’Éditeur (Libération... ), le reste n'est qu'un billet d'humeur.
Il faut reconnaître qu'Un libraire en colère n'est pas une réflexion ni un essai sur les maux qui affectent la librairie. C'est un cri. c'est la voix du mourant qui s'accroche à la vie. C'est une colère pour sortir de l'indifférence. C'est le dernier message avant l'effacement, l'oubli et la disparition. Emmanuel Delhomme voit son commerce menacé. Il se sait condamné. Il dresse le bilan, fait le constat, vomit ce monde nouveau et connecté.
Ceux qui attendent de son ouvrage une portée générale (par rapport au commerce indépendant, aux changements sociaux...) seront déçus. Emmanuel Delhomme prêche pour sa paroisse et n'atteint jamais l'universel. Ce n'est pas le but mais cela restreint d'autant l’intérêt de ses remarques.
Pourtant, il touche les vrais problèmes mais sans approfondir, il focalise sur quelques faits et y revient obsessionnellement. Ah ! Internet ! les portables ! La colère est revendiquée mais elle est simplificatrice. L'auteur frappe maladroitement, parfois injustement. Il n'est pas tellement honnête, intellectuellement parlant, quand il passe indifféremment de la crise du Livre à celle de la lecture (qui n'est pas prouvée). Et malgré quelques jolies pages, plus on avance dans le texte, plus on le sent aigri, plus on se lasse, plus... il nous perd.
Un libraire en colère de Emmanuel Delhomme, aux éditions L’Éditeur, mai 2011.
Je profite de cette critique pour renvoyer à un article précédemment écrit sur les maux du Livre.
Ajoutons, concernant la librairie, que :
- La spéculation immobilière a des conséquences dramatiques autant sur les commerces que sur le pouvoir d'achat et le moral des ménages. La mairie de Paris essaye difficilement de trouver des solutions : Vital'quartier.
- Le prix unique du Livre, restreint à quelques pays, ne correspond plus aux habitudes de consommation (généralisation de la seconde main, internationalisation du commerce, nombreuses opérations éditoriales : un livre en cadeau pour l'achat de deux... ). Que faire ? L'abrogation de cette loi serait, pour les libraires indépendants, suicidaire.
- Le système qui permet les retours d'ouvrages invendus en contrepartie d'un avoir est d'une grande perversité. Quand les ventes diminuent, les retours en provenance des librairies augmentent. Pour couvrir et compenser les avoirs, les éditeurs produisent plus de livres. La machine s'emballe. C'est le système de cavalerie. Emmanuel Delhomme compare cela à juste raison au système bancaire (crédits... ).
- L'accueil en librairie est un des points noirs de la profession. Réputé froid, caustique et peu engageant, le libraire intimide. Même si l'image est en train de changer et que les choses bougent, il est difficile de ramener à soi un client refroidi.
On pourrait rapprocher cela des bistrots "à l'ancienne" où les patrons bougons et peu aimables ont râlé contre la concurrence des fast food sans se remettre en cause. Il a fallu l'arrivée d'une nouvelle génération avec d'autres concepts pour faire revenir la clientèle.
Alors, ne désespérons pas.
- Monsieur -
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