lundi 20 décembre 2010

La Grande Épicerie.

Aujourd'hui, nous ne parlerons que des coffrets-gadgets. Les ouvrages habillés d'un boitier ou accompagnés d'un CD-DVD restent des produits (que je n'aime pas ce terme ! ) culturels. Quant aux smartbox, bien que vendues en librairie, ce ne sont pas des livres, ce sont des bons d'achats.

Il y a un an, Actualitté avait publié un article fort intéressant sur l'économie du Livre avec un long passage concernant les coffrets. Nous n'avions pas jugé nécessaire d'achever une ébauche que nous avions élaborée sur le même sujet. 
Même période, mêmes effets ; rien n'a changé. L'offre abonde et notre colère se réveille.

Attardons-nous sur les coffrets culinaires nous épargnant ainsi les coffrets plaisir (avec le godemiché format rouge à lèvres ou les menottes de bon goût recouvertes d'une fourrure), le coffret tricot de chez Michel Lafon (avec une pelote de laine pour entamer la manche d'un pull), et son pendant en tricotin chez Flammarion.



Fuyons les coffrets "ballerine" avec le tutu et parfois même les chaussons de danse (chaussons trop grands ou trop petits, chaussons pour décorer les murs ! )












À ce moment, je pense à la déception des enfants qui reçoivent ce genre de cadeau inadapté, au sourire embêté de la grand-mère qui voulait faire plaisir, au garçon qui voudrait être danseur...

Trêve de sentimentalisme ! Passons aussi sur les coffrets massage (avec huile et galets), les coffrets shampooing et soins du corps (sponsorisés par de grandes marques de cosmétiques), passons, passons...
Oublions les coffrets pour les Nuls avec des guitares qui éloigneront de la musique des générations d'oreilles meurtries.

Et demandons-nous pourquoi cet afflux de coffrets en librairie?


Tous les éditeurs s'engouffrent dans la brèche (Larousse, Gründ, Tana, Seuil, SAEP, Marabout, Ouest-France, Flammarion, ESI...), tous les coffrets se ressemblent, fabriqués et souvent conçus par des agences spécialisées, extérieures aux maisons d'édition.
Cela débouche sur une standardisation dans la diversité des choix.

Prenons l'exemple de deux coffrets consacrés aux "recettes" de fruits de mer, l'un chez Gründ, l'autre chez Ouest-France. On retrouve la même pince à crustacés en forme de patte de crabe accompagnée de 4 piques-curettes.




Et l'on pourrait multiplier les comparaisons...


Alors que les publications sur le développement durable et les messages d'alarme sur l'accumulation des déchets (leur traitement fait marcher l'économie mais chut, je m'égare...) fleurissent dans les rayons, les éditeurs se sentent exonérés, dédouanés. Ils encombrent les bateaux, les entrepôts (pas trop), les camions, les librairies (beaucoup).
Qui a parlé d'éthique ?
C'est une façon d'étouffer la concurrence : on écrase, on submerge, on prend la place. Le lecteur de passage devra chercher les livres, derrière, au fond, les commander éventuellement.
Le libraire n'en peut mais. Il est contraint de suivre s'il veut continuer à travailler avec ses fournisseurs sans être pénalisé.
Il subit aussi une forme de chantage à la disponibilité :

les tirages sont limités (Disons que la "mise en place" de départ est importante, voire totale, pour éviter un stockage long et consommateur d'espace chez les fournisseurs), le temps de réimprimer (le plus souvent en Chine), d'acheminer, les fêtes seront passées et le libraire pourrait rater des ventes.

Car il faut être lucide, le client en réclame : du clinquant, de l'imposant, du tape à l'œil. Le livre ne se suffit plus à lui-même. C'est Noël, que diable ! 
Qu'importe le lieu de fabrication, le commerce extérieur, le client se réjouit du cadeau prêt à l'emploi. Il n'y a plus de souci . Emballé, c'est pesé.


Mais posons-nous la question, qu'est-ce qui importe le plus dans l'achat d'un coffret ?
Le gadget ou le livre ? Le livre, alibi culturel ? Ou alibi tout court ?
C'est si peu de chose un livre...

Voyez, pour l'achat d'un cook'in box papillotes, il y a un livre. Un vrai livre en option.



D'ailleurs, qui paierait pour...
Oh, pardon. Je n'avais pas compris :

Un objet manufacturé, la notice d'utilisation accompagnée de quelques recettes, le tout dans un bel emballage... non?! Ce n'est pas possible, dîtes-moi que je me trompe?!

... Oui, je me trompe ! La preuve : le livre vaut souvent plus cher que l'objet qui l'accompagne. Objet qui, soit dit en passant, ne correspond pas toujours aux attentes des clients : je ne me risquerai pas sur le terrain de la qualité des composants mais, quand elle est au rendez-vous, c'est souvent la quantité qui fait défaut.

Le coffret serait donc un produit d'appel ?

On approche du problème.
Prenez vos calculettes et chaussez vos lunettes...


Nous allons terminer sur la partie la plus rébarbative de ce bavardage, elle concerne la TVA et la lisibilité des prix.
En effet, qui sait en achetant tel ou tel coffret ce qu'il achète vraiment, la valeur réelle du livre et de l'objet ?
C'est à mon sens, l'enjeu principal pour lequel devrait se battre le consommateur avisé.


Pourquoi ne pas établir un étiquetage clair en détaillant les prix par catégorie de TVA  ?


Le livre a un prix fixe défini par la loi avec un taux de TVA de 5.5%. Il peut cependant être offert.
L'objet, avec sa TVA au taux de 19.6%, peut être donné mais ne peut pas être vendu en deçà de sa valeur réelle.



Prenons le coffret Pâtisserie : L'atelier gâteaux chez Marabout ; le livre de 72 pages coûte 7.90€, les gros moules valent 17€. Valeur totale : 24.90€

A contrario, le prix du coffret Chantilly Mousses et Cie chez Larousse se décompose de cette façon : le livre est à 37,48€, le siphon en métal à 8.42€. Pour un prix total de 45.90€.


Quand Gründ parle de "matériel offert" au dos d'un de ses coffrets, il y a mensonge car le fournisseur facture au détaillant une double TVA : 75% du prix est rattaché à la TVA du  livre et 25% concerne les ustensiles ( TVA de 19.6%).




 Quand SAEP vend des coffrets avec une TVA unique de 19.6%, c'est que le livre est offert.



Mais quand ce même éditeur applique une TVA de 5.5% sur le coffret Petits Fours, ce sont les emporte-pièces qui sont donnés.


Pourquoi cette différence ? Leur logiciel de facturation n'est-il pas configuré pour décomposer le prix d'un article en fonction d'une double TVA ?
Serait-ce une manière de trouver un équilibre comptable, de couper la poire en deux ? Certains articles à 5.5%, d'autres à 19.6%. On est en droit de se poser la question ?


Quoiqu'il en soit, et c'est ce que nous avons essayé de démontrer, il y a un flou, un manque de clarté et de lisibilité qui nuit au client et à tous les acteurs du marché.


Pour Conclure sans aigreur avant la trêve des confiseurs, arrêtons-nous sur un véritable coffret qui ravira les amateurs :  
The Jedi Path : A Manual for Students of The Force.


 
envoyé par Hooltra.


Ce boîtier destiné à la présentation et à la protection du livre explique en partie le prix de l'ensemble : autour de 99$.

- Monsieur -

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