samedi 2 novembre 2013

L'esprit du Livre.

Une image est parfois plus parlante qu'un texte :



La rue Hautefeuille est bien nommée. 
Elle se situe dans le quartier Latin, à deux pas du boulevard Saint Michel.
Ces vues caractérisent bien l'état d'esprit dans lequel se trouvent la plupart des salariés dépendants des métiers du Livre.

- Monsieur - 
à Paris, le 31 Octobre 2013.

vendredi 4 octobre 2013

Architecture durable

Pour flatter une partie de son corps électoral et ne pas se dédire une nouvelle fois, le gouvernement a modifié les rythmes scolaires. La mairie de Paris, comme beaucoup d'autres, s'est empressée de mettre en place cette réformette aux conséquences "incalculées". Les journées sont désormais morcelées et les jeunes enfants épuisés.
Bref, passons, disait Pépin.
Comme les cours s'arrêtent plus tôt certains jours de la semaine, des périodes d'animation ont été constituées pour "occuper" les enfants jusqu'à la fin de la journée scolaire.
Soit.
Arrêtons-nous sur l'une de ces activités : Architecture durable.

 Cet atelier est proposé à des enfants de primaire dont certains apprennent à lire ( 6-7 ans ). Le titre est ronflant, ridicule et démagogique mais acceptons-le, soyons modernes. Il est vrai qu'Atelier d'Architecture serait d'un plat, n'en parlons pas ! Quant à durable, c'est l'équivalent d'écologique, cela fait bien, c'est de bon ton.
Lors de chaque séance, une photocopie de format A4 pliée en 2 est proposée aux écoliers, en voici les scans :

Décor ne prend pas de S.
 
La brique de terre est un matériau sans X.
Choisi prend un S.

Que dire de la tournure des phrases, de l'orthographe ?
Que dire de ces photos sans relief, mal photocopiées ? de ces dessins minuscules et si peu représentatifs ?

Je pourrais me fâcher, vitupérer contre le CAUE de Paris, déplorer la faiblesse de l'enseignement, protester contre l'utilisation de nos impôts, il n'en sera rien.
Je préfère sauter dans les flaques et cracher vers le ciel.


- Monsieur -

dimanche 29 septembre 2013

Parade

Alors que la Serbie vient d'interdire le défilé de la Gay Pride pour des raisons de sécurité, saluons ici le courage de celles et ceux qui osent mettre en place de tels évènements. Au delà des polémiques législatives en France, au delà des déclarations provocatrices de Pierre Bergé, il est encore des pays, des endroits où la vindicte et la culpabilisation collective sont des prisons terribles.


La Gay Pride existe pour ça, pour que l'on puisse aimer, simplement, une personne de même sexe sans subir de jugement. C'est un appel à la tolérance, c'est se rendre visible pour ne plus se cacher, c'est rejeter l'hypocrisie. Ce n'est ni une déclaration de guerre, ni un appel à la violence. Aller défiler à la Gay Pride ( même si je n'aime pas le nom anglo-saxon ), c'est donner son corps en pâture, c'est un non-renoncement.


La Parade le démontre très bien. Ce film de Srdjan Dragojevic raconte avec humour la préparation en 2001 de la première Gay Pride à Belgrade. C'est drôle, excessif, parfois caricatural mais les personnages ( très bien joués ) ne sont jamais monolithiques. Le film révèle ici toute sa finesse. Tout un jeu de nuances se dévoile derrière les apparences, brisant ainsi bien des idées reçues.


La Parade, un film drôle et émouvant de Srdjan Dragojevic, sorti en France en 2013.
Sortie en DVD en Juin 2013 Chez Blaq Out ( également disponible en streaming ).

- Monsieur -

lundi 23 septembre 2013

Pulphead

Pulphead de Jeremiah Sullivan aurait pu m’intéresser. Le livre était agréable au regard, au toucher. Un journaliste au cœur des reportages, de la musique, de l'humanité, le résumé en quatrième de couverture était alléchant :

Lire les chroniques de Pulphead, c’est grimper à bord d’un camping-car de neuf mètres de long pour rejoindre les ados d’un festival de rock chrétien. C’est dormir sous le même toit qu’un vieux fou, le dernier des Agrarians, chef de file des écrivains du sud des États-Unis. S’interroger sur l’art en sifflant des cocktails dans une boîte branchée aux côtés du Miz, star de la téléréalité. Croiser la solitude de Michael Jackson ou celle des sans-abris après Katrina. C’est se demander pourquoi Axl Rose, né au milieu de nulle part, est devenu Axl Rose, le chanteur des Guns N’Roses. Se frayer un chemin dans une manifestation pour protester contre la réforme du système de santé américain. C’est, dans la fumée jamaïquaine, à Kingston, distinguer les dreadlocks de Bunny Wailer, l’unique survivant du groupe de Bob Marley. S’enfoncer dans des grottes du Tennessee à la recherche des origines de l’homme. C’est aussi écouter en boucle un blues des années 30, pour essayer de retrouver, malgré le disque rayé, un mot inaudible perdu quelque part dans l’histoire.
En quatorze chroniques détonantes, John Jeremiah Sullivan décline sa quête de l’identité américaine, fouillant dans les entrailles de sa culture pop, scientifique, underground ou littéraire pour répondre à des questions universelles : Qui sommes-nous ? De quoi sommes-nous faits ?
Si sa plume l’élève au rang des hérauts du nouveau journalisme, John Jeremiah Sullivan a su trouver son propre regard, dans lequel l’intelligence, la curiosité et le charme le disputent à une bienveillance stupéfiante pour ses contemporains.

C'est après que ça se gâte :

John Jeremiah Sullivan écrit pour le New York Times Magazine, GQ, Harper's Magazine, et Oxford American. Il est rédacteur en chef de la section littérature du Sud des États-Unis de la grande revue littéraire The Paris Review  Il vit à Willmington, en Caroline du Nord.

" Par sa verve débridée, son hyper éloquence du Sud des États-Unis et son excentricité, Pulphead dépote et on devient très vite accro. " The Guardian

" Son hyper éloquence du Sud des États-Unis " me bloque... jamais entendu parler d'hyper éloquence ; ça ne veut rien dire. Bien sûr, c'est français, il n'y a pas de faute... mais quand même...
Et même si ! Parler d'hyper éloquence pour le Sud des États-Unis, ça ne colle pas avec le phrasé, la gouaille des Rednecks, avec les sonorités qui vont avec. Ça me turlupine.
Je retrouve la version originale sur le site de l'éditeur Random House :

Pulphead has a ramshackle loquacity, a down-home hyper-eloquence and an off-the-wallishness that is quite distinct - and highly addictive.

Mouaip... " hyper-eloquence". À l'école, les enseignants nous mettaient en garde contre les faux-amis et ils étaient sévères... c'était une autre époque. Je suis d'une autre époque, un vieux schnock. Je ne lirais pas ce livre.

Pulphead de John Jeremiah Sullivan, aux éditions Calmann-Lévy, 2013.
Traduction de l'anglais par Nathalie Bru et Estelle Jacquet-Dégez.

- Monsieur -

mercredi 18 septembre 2013

Cépaduès

On n'accorde pas toujours d'attention aux premières pages des ouvrages qu'on achète et pourtant...


Ce petit détail en page de titre nous permet de saluer le travail des éditions Cépaduès. Cet éditeur scientifique et technique s'adresse également aux lecteurs passionnés de pilotage et d'aviation. Ce clin d'oeil amusant à leur intention est aussi un gage de sérieux et de précision.

- Monsieur -

mercredi 11 septembre 2013

Vive l' anarchie !

Alors là, bon courage ! Les parents qui vont inculquer les leçons de ce livre à leurs chers petits monstres devront avoir les épaules solides et une patience d'ange.
" Brisons les règles " se rapprocherait plus du titre original ( a rule is to break ) que  Vive l'anarchie ! car ce petit guide est un livre de désobéissance et non d'anarchisme (  l'anarchie imposant la plus difficile et délicate des lois : l'élévation de l'âme dans le respect des autres, du Monde et de son être ).
Pour amener un enfant vers l'anarchisme, il faut une rigueur de vie, des règles de comportement qui frisent la perfection ; et le plus dur, car le plus rare, il faut du temps.
On ne s'adresse pas à un enfant comme à un adulte. Les acquis ne sont pas les mêmes, la compréhension non plus.
" Apprends par toi-même " disent les auteurs, mais à qui s'adressent-ils ?
" Acquiers le savoir, engrange les connaissances, il sera toujours temps de te révolter. Fourbis tes armes ! " devrait-on conseiller, " Après, tu pourras te forger un esprit critique."

Prôner le refus systématique, le désordre, la satisfaction des désirs et des instincts primaires n'aidera pas les enfants même si c'est flatteur pour le lecteur ( et je renvoie à la pédagogie Montessori ).

Dans le même ordre d'idée, dire ce que l'on pense est le contraire de la délicatesse, de la subtilité et parfois même de la politesse dans certaines circonstances mais tout cela s'apprend. C'est le fondement des civilisations, de la sociabilité.

Pourquoi vouloir à tout prix s'opposer, rejeter ?
Pourquoi tout prendre à l'envers, pourquoi tout prendre à rebrousse-poil ?

" Fonce et fais du bruit ! Fais de la musique même si tu n'as pas appris. " ( j'imagine que les auteurs n'ont pas d'enfant ).
" Bricole et n'achète pas. " Le propos est louable, boboïsant, mais quelle démagogie !
Je préciserai aussi aux auteurs ( vers le milieu du livre ) que le don est gratuit : " Donne des choses gratuitement. "

Si j'avais un dernier conseil, je renverrais les lecteurs vers Pinocchio ou Max et les Maximonstres qui apportent bien plus de réflexions sur l'ordre et le désordre, sur la construction de soi que ces quelques pages colorées et joliment présentées.

extrait de la quatrième de couverture

Les enfants apprécieront certainement le côté subversif ( à leurs yeux ) de cet ouvrage et les dessins fort plaisants mais parler d'ambition à son propos, permettez-moi de rigoler !
( même si ça m'a fait reprendre le clavier. )

Vive l'anarchie ! de John and Jana aux éditions Graine 2, paru en septembre 2013.

- Monsieur -

lundi 25 mars 2013

Salon du Livre de Paris 2013 : une installation

Voilà quelques années que je n'avais pas participé à l'installation du Salon du Livre. J'aime cette effervescence que l'on peut retrouver à Rungis ou au marché aux fleurs d'Aalsmeer, cette urgence du déballage et de la mise en place.


8 heures 30. Tous les corps de métier se retrouvent dans ce grand décor éphémère. Les menuisiers ajustent les derniers éléments dans une bonne odeur de poussière, de colle et de bois. La peinture n'est pas sèche que les électriciens installent les luminaires sur les stands.
Autour, une armée de "pakis" déroule des mètres de moquette. Le geste sûr et appliqué, ils découpent les bordures au cutter. Quant à parler français, ils sont plus... évasifs.
Deux jeunes chauffeurs récupèrent les palettes. Ça arrange leurs fins de mois et ça nous débarrasse.
Distincts par leur allure, une nonchalance naturelle, de grands hommes du désert poussent inlassablement de lourds chariots d'acier dans lesquels on déverse les cartons préalablement découpés et pliés. Il y a quelques années, il me semble qu'ils étaient plus nombreux et le faisaient eux-même mais peut-être que mes impressions sont trompeuses... 


C'est dans cet univers que se mettent en place les stagiaires, intérimaires et autres petites mains du Livre cornaqués par quelques directeurs et grands pontes de l’Édition. Ceux-ci supervisent, mettent la main à la pâte car il ne s'agit pas de se rater : c'est l'image d'une année, la représentation ! Les enjeux financiers et professionnels sont énormes ou... surévalués. On aime à croire en l'importance de ce Salon.


Vers la fin de la matinée, la fatigue aidant, les gens remettent les manteaux, les allées et venues sont plus nombreuses. La fraîcheur du Hall est réelle, autant que les courants d'air. Un message demande de faire attention aux voleurs, il sera répété tout au long de la journée.


C'est l'heure de déjeuner. Le rythme est moins soutenu. Le gros des livraisons est terminée depuis longtemps.


Des "responsables" arrivent. C'est là que j'aperçois Gilles Cohen-Solal dans son pardessus froissé accompagné de Madame. Je ne peux m'empêcher de penser à l'émission Strip-Tease, l’Édition, c'est pas de la littérature, consacré au "patron" des éditions Héloïse d'Ormesson. J'observe :
Gilles Cohen-Solal se dévêt, range des bouteilles de vin dans la réserve de son stand ( l'inauguration est un moment important et réputé d'hypocrisie mondaine autour de quelques verres...) et s'arme d'un cigare.
Véritable maquignon du Livre, désillusionné, caricatural, excessif, consternant, théâtral... c'est un personnage intéressant en tant que matière littéraire. Ce qui m'étonne le plus c'est l'apparente indifférence de son entourage, à la fois impassible, mais à l'écoute. Il mériterait une thèse car c'est un cas d'étude, la version non policée d'une partie importante du monde de l'Édition et pas seulement de l’Édition.


Le commissariat général va ouvrir. Les livres neufs ont fière allure.
Ma journée se termine.

- Monsieur -