mardi 29 décembre 2009

Sasmira t.2 : La fausse note (à paraître)

Nous venons d'obtenir une information importante, à côté de laquelle nous étions passés jusque là : Laurent Vicomte a travaillé le scénario du deuxième tome de Sasmira dont la sortie est prévue chez Glénat, laissant le dessin à Claude Pelet : le travail est désormais bien avancé!

Je vous laisse découvrir les premières planches sur le site de l'illustrateur, que nous avons découvert grâce à un commentaire ajouté à notre article sur le premier tome. Mille mercis à Claude!

Attendu depuis douze ans, on commençait à prendre cette suite pour l'Arlésienne. L'attente devrait être récompensée en 2010, si l'on en croit son éditeur, Claude Marguin, répondant à une discussion assez virulente à ce sujet.
Les possesseurs du premier tome édité en 1997 ne verront jamais leur collection joliment terminée chez les Humanoïdes Associés. Je trouve cela dommage. D'après moi la couverture originelle était plus marquante que la seconde chez Glénat, donnant plus de densité au mystère de Sasmira par le choix des couleurs et du sujet, mais le contenu reste le même.

Beaucoup de lecteurs devront faire un choix entre une série dépareillée ou l'acquisition du premier tome chez Glénat en plus de l'édition des Humanos, et ça agace. Rappelons toutefois que l'essentiel est de voir cette histoire aboutir : si tant de gens râlent après ces soucis éditoriaux, c'est qu'il s'agit d'une histoire passionnante, qui nous a tenus en haleine durant de longues années et a continué de toucher son public, malgré tout.

Aujourd'hui, Pelet réalise un petit exploit : celui de reprendre le dessin de Vicomte où les détails abondent et les costumes ont toute leur importance. De ce que j'en vois sur son site, tout y est; visages, têtes légèrement penchées de femmes intriguées, chapeaux, paysages... Les planches, mises en ligne en tout petit format au fur et à mesure de l'avancement du travail nous tiennent en haleine...
Vivement la parution de ce tome 2, édition initiale ou pas!

Dans l'attente de vous lire, donc, chers Vicomte et Pelet...

- Madame -

Sasmira tome1 : L'appel
Scénario et illustration : Laurent Vicomte
éd. Les Humanoïdes Associés 1997
ou éd. Glénat 2008

À paraître:
Sasmira tome 2 : La fausse note (titre provisoire)
Scénario : Laurent Vicomte
Illustration : Claude Pelet
éd. Glénat (prévue pour 2011)

dimanche 20 décembre 2009

" Cachez ce sein que je ne saurais voir "

La censure est un vaste sujet, fluctuant s'il en est: elle s'immisce partout, en tout temps et tout lieu; économique, sexuelle ou politique, son étude nécessiterait un site régulièrement remis à jour: un travail d'analystes, d'historiens, de juristes et sociologues réunis. La tache serait titanesque. La volonté nous manque moins que le temps; nous resterons modestes.

Quelle différence y-a-t-il entre cette accroche pour l' iPhone (en lien avec le site Apple-entreprise) visible sur internet la première semaine de décembre :


et Toxique de Françoise Sagan illustré par Bernard Buffet?


Sur la photo, la pose est suggestive, le costume ridicule, la plastique irréelle. On est dans l'imagerie publicitaire, dans le factice; on suggère le désir, on (sur)joue. Les codes sociaux des sociétés puritaines et patriarcales sont assumés. L'ordre des choses est respecté. Hypocrite, malsain, mais respecté.

Toxique n'est pas un problème. Sagan n'en est plus un. Par contre le trait de Bernard Buffet semble gêner Apple... qui censure! Je vous renvoie à ce sujet sur la République des livres -blog pour le moins intéressant.
Serait-ce le sexe qui dérange? Ou l'organique?
Serait-ce le poil, l'odeur, le vivant?
Ça grouille, ça respire, ça vit!
Le peintre est cru; le geste est sûr, sa calligraphie sincère: la nudité de l'œuvre s'oppose à la vulgarité, à l'habitude et aux convenances. Bernard Buffet est unique. Il n'a rien à perdre; il se livre. L'artiste joue son âme. Seul, il est incontrôlable.
Sagan aussi me direz-vous mais les censeurs ont des œillères, ce qui rend leurs décisions aussi arbitraires que stupides.

J'en veux pour preuve les créations du Dernier Cri qui furent bloquées à la frontière Suisse pour pornographie. Stupeur! Comme quoi, tout est question de regard. On établit des règles avec des interdits et on les interprète, on adapte.
Ainsi, de nombreux États privilégient la contrainte à l'amour, la puissance à la fragilité. Disons, avec un sourire feint, que c'est une forme de pudeur, d'extrême timidité, un carcan à l'émotion. Il n'y a d'ailleurs pas d'émotion dans le porno: on est dans le "sur-moi", le "sur-joué", l'interdiction de l'échec. On refuse la faiblesse.

Ce qui est inquiétant dans l'exemple d'Apple, c'est qu'une société privée remplace l'État de droit dans son rôle de police. Serait-ce de l'autocensure (comme cela arrive trop souvent dans l'édition française) ou un excès de zèle? De la prudence ou une application stricte et restrictive de la loi américaine?
Des créateurs français ont déjà eu des consignes (des directives) pour que leurs œuvres puissent s'exporter sans problème dans des pays plus restrictifs que le nôtre. Les possesseurs des réseaux, futurs maîtres du Monde, voudront-ils imposer leurs diktats? L'État a ses soldats.

La hiérarchie, la loi; il y a obéissance et soumission: ce sont les codes à respecter. Il est même à craindre que la féminisation des postes à responsabilité ne change rien à cette situation. Le formatage est à l'œuvre; il commence à l'école, se prolonge dans les études: tu dois te plier à la norme, à la pression sociale, être un bon petit soldat. Tu te mets de côté, tu gommes tes différences pour pouvoir t'intégrer. Être invisible, ne pas se distinguer, oublier d'être soi.

Prions avec cette déclassée, prostituée de province, qui expliquait en sortant de l'église: "Tous les dirigeants du Monde et ce, depuis l'origine du temps, ont compris qu'on tenait les Hommes par le sexe et le ventre."
L'on pourrait d'ailleurs prolonger le débat avec le calibrage des fruits et légumes...

Je vous avais prévenu: c'est un vaste sujet et je préfère clore ce chapitre aussi décousu que mon pantalon.



N'hésitez pas à vous offrir en prolongement de cet article (c'est Noël, on se fait un petit plaisir):

Toxique de Françoise Sagan illustré par Bernard Buffet aux éditions Stock. Un très beau texte dont on peut regretter la qualité (médiocre) de l'édition papier.


La Mondaine de Véronique Willemin aux éditions Hoëbeke se lit comme un roman policier. Cette enquête s'attache aux petites et grandes affaires de la brigade. Chaque chapitre retrace des histoires, des périodes, de façon concise sans tomber dans le pathos ni l'outrance. Véronique Willemin s'est attachée aux protagonistes des deux bords avec une neutralité exemplaire. Une source d'inspiration pour les auteurs en herbe avec une réalité qui dépasse souvent la fiction et une iconographie invraisemblable. C'est un comble : on se prend à fantasmer sur les archives de la police !
Une réflexion de Jacques Arnal, patron de la Mondaine de 1952 à 1955, apporte de l'eau à mon moulin : " Nous ne pouvons nous arrêter au concept du bien et du mal, alors je préfère la notion d'habitudes. Cela signifie que certains actes soulèveront un jour la réprobation uniquement parce qu'ils sont contraires aux habitudes du moment... " (page 141)
Un des meilleurs livres parus sur la police et l'histoire des mœurs. À lire et à recommander.



Le Dictionnaire des Livres et Journaux interdits de Bernard Joubert aux éditions du Cercle de la Librairie. Une somme! À tout point de vue (70€). Impressionnant par le nombre d'articles, illustré de très nombreuses vignettes, c'est le relevé systématique et analysé des décisions de la commission de censure depuis 1949 en France. Bernard Joubert nous ouvre les portes de son travail. Érudit, passionnant, il nous fait passer du sourire à la surprise, de la roublardise des éditeurs à l'aveuglement clinique des censeurs. À lire et relire, à consulter souvent.
Pour exemple, je cite la page 28: " Abondances. Revue de photos de femmes à grosses poitrines, quel que soit leur âge ou la grâce de leur physique [...] la Commission de surveillance émit ce commentaire [...]: Reproductions anormaux d'êtres anormaux." Tout est dit.

-Monsieur-

Toxique
de Françoise Sagan
illustrations de Bernard Buffet
éd. Stock 2009

La Mondaine
de Véronique Willemin
éd. Hoëbeke 2009

Le Dictionnaire des Livres et Journaux interdits
de Bernard Joubert
éd. du Cercle de la Librairie 2007

Le Régime Tahiti

"Avant la plage, à la rentrée, après les fêtes de fin d'année, au printemps..." *

Si le contenu est aussi sérieux que la couverture, il faut prévoir l'opération:
Et on supprime les côtes flottantes!




( * citation reprise sur le site
des Éditions Leducs)

-Monsieur-

Le Régime Tahiti de Jessica Azyadé aux Éditions Leducs.

samedi 12 décembre 2009

Épuisés

Il est des endroits où l'on s'égare parfois en se disant qu'on devrait y aller plus souvent. C'est le cas de Aaapoum Bapoum, rue Serpente à Paris. J'avouerai ne rien comprendre aux prix ni au marché de l'ancien mais quand on y trouve son compte...
Je navigue entre les bacs de livres plus ou moins défraîchis à 3, 5, 7 euros... j'oublie les versions rares, les collectors destinés à d'autres bourses, mieux garnies que la mienne. Radio classique enveloppante, les deux libraires sont beaux: lui, barbu, légèrement émacié; elle, aussi brune que lui, enceinte sous une longue robe noire. Sensation de roman russe. Je fouine, ça sent le bois et l'odeur de vieux livre, j'oublie tout. Un instant de bonheur.
Je dégotte quatre livres pour la jeunesse, quatre BD épuisées, quatre livres qui ont moins de quinze ans!

Félix contre le Nuage qui changeait tout de Fabrice Lebeault. C'est un rêve enfantin, un conte écrit par l'auteur d'Horologiom. Fabrice Lebeault se fait plaisir et c'est un vrai bonheur. Le dessin est plus souple que dans le Mangeur d'Histoires; des souplesses de langage parsèment également les dialogues. Elles ont pu effaroucher les parents sages mais les gamins (petits et grands) y trouveront leur compte de drôleries et de rebondissement naïfs.

Félix contre le Nuage qui changeait tout, éditions Delcourt, 2001.

Bouchon et l'Ogre Noir de Taymans et Di Giorgio. Une découverte et un régal. L'histoire d'un petit cochon qui se met au lit, s'endort et se retrouve dans la forêt magique. Tout est simple, limpide, le dessin comme l'histoire. Cette bande dessinée pour les grands de... quatre, cinq ans est d'une poésie qu'on ne retrouve guère dans l'offre éditoriale actuelle. Amusante, d'une gentillesse rafraîchissante, cette série qui comporte quatre tomes indépendants n'a eu ni les faveurs des critiques ni celles, apparemment, du public. Dommage.

Bouchon et l'Ogre Noir, éditions Casterman, 1997.

Monsieur Madame de Charlie Schlingo. Un vrai pastiche de la série des Monsieur Madame de Roger Hargreaves! Du pur Schlingo! Accessible à tout le monde même aux plus rétifs à son dessin! Et oui, monsieur! C'est d'une drôlerie sans nom! Et quand Madame le lit à son petit bonhomme, c'est toute la famille qui rigole!

Monsieur Madame, éditions du Seuil, 1995.

Le petit dernier? Je le cherchais depuis des années.

"C'est une BD avec deux personnages qui philosophent au bord d'une falaise. Philosopher est un bien grand mot pour désigner leur tête-à-tête. Ils se racontent le Monde de façon rationnelle, forment des explications avec leurs connaissances et leurs nombreuses lacunes. Ils s'inventent un univers qui, pour eux, tient la route. Ils analysent et se rassurent. Enfin, pas toujours..."
Présenté de cette façon, les libraires à qui je faisais part de ma requête me regardaient d'un oeil rond, retournaient à leurs papiers, m'oubliaient dans un soupir sans nom chargé de lassitude et d'exaspération.

Et là, je retrouve cet album, ce souvenir incertain au milieu de ses copains. Comme quoi le bien-être ne vient pas que du massage!

Prop et Emmanuelle: l'Univers mérite une Leçon de Alph (Alphonse Desneuves) est une conversation attachante. Les déductions sont simples, les réactions des héros enfantines. Le non-sens a une logique qu'Alph a su retranscrire. J'en profite pour souligner la jolie mise en couleurs de Yves Lencot et regretter la politique de Casterman qui a sabré son catalogue comme un hussard aveugle et sans pitié.

Prop et Emmanuelle, éditions Casterman 1995.


-Monsieur-

jeudi 10 décembre 2009

dimanche 6 décembre 2009

D'un Même Cœur


Il fait gris. En passant boulevard Saint Michel à Paris, je jette un œil sur les bacs à rebuts de Boulinier. Geste machinal, quasi systématique... une certaine attirance pour le vilain papier, pour les vieilles couvertures, un besoin impulsif, que sais-je encore, la maladie du livre.
Les Voyous attendent leur terrible destin: un livre aux feuilles jaunies et cassantes; un livre dépouillé de toute couverture; un livre qui s'apprête à finir sur le trottoir mouillé et dont tout le monde se fout.

- ramasseurs de mégots; récupérateurs de livres... à chacun sa misère, à chacun son époque -

Les derniers étudiants du quartier s'agglutinent autour des comptoirs à sandwichs et à crêpes d'où s'échappent des vapeurs odorantes et sucrées.
Au moindre va-et-vient, à chaque mouvement de mains, les Voyous se brisent un peu plus, leur dos fatigué se déchire; de l'avant en arrière, un curieux les redresse, belote et rebelote, comme la main balaie les touches d'un piano de bastringue, les livres dominos attendent leur prochain maître. Et dix de der! Fatalitas! C'en est fait de leur triste destin.
Un nuage de bohémiennes écoule sa litanie larmoyante dans les ruelles pavées et caresse les sacs des touristes nombreux. Les "Voyous" finiront griffés par le vent froid et quelque talon haut de parisienne égarée.

Je pense à l'automne, aux arbres dénudés... Jean Follain... pourquoi Jean Follain?

Mon regard s'arrête sur un livre relié que je ne lirai sûrement jamais ou alors un jour de grande mélancolie. Vingt centimes... je tourne quelques pages... je souris... je pars... je reviens sur mes pas: vingt centimes pour une curiosité.
Je vous fais partager quelques scans et délaisse les Voyous.













- Monsieur -

Un coeur nouveau
de Alexander Baron
Préface d'André Maurois
éd. Hachette 1950

jeudi 3 décembre 2009

Potache

Numérisation façon Google.



Dans la pièce du fond
De William Chambers Morrow
Collection Domaine Étranger
Éd. 10/18 2009